La dernière partie du combat à l’épée seule concerne la confrontation avec les armes d’hast, comme la lance, la pertuisane ou la pique. Ce thème est récurrent chez les auteurs parlant de l’épée à une main, jusqu’à 19e siècle ou l’on trouve encore du sabre face à la baïonnette. Mais le contexte du 16e siècle est sensiblement différent : l’épée fait partie du costume et elle est souvent porté au côté par les citoyens des cités. Les armes d’hast quant à elles, sont l’apanage des gens du maintien de l’ordre et des dépositaires de l’autorité publique. La rencontre de ces deux armes a donc plus lieu dans la rue que dans les salles d’armes. On est ici clairement dans les affaires sérieuses, contrairement à toutes les parties précédentes qui proposaient des pièces utiles pour le jeu et pour le reste.
Comment tu dois te tenir avec une arme à une main contre épieu ou une arme similaire
Fais cela ainsi : lorsque tu es surpris et assailli par un adversaire qui a un épieu, après que tu aies tiré ton arme précipitamment, dirige-la alors dans la garde basse à droite, de sorte à ce que ton pied gauche se trouve devant. Prends garde au moment où il frappe vers toi d’en haut : saute alors vers lui, bien sous son coup. Tourne aussitôt ton arme vers le haut et esquive avec ta tête en penchant ton corps sur le côté, sous son bâton. Attrape ainsi le coup sur le plat de ta lame, comme tu peux le voir avec les personnages à gauche de la gravure précédente.

Parallèlement, attrape son bâton sous ton arme avec ta main gauche. Mais s’il retire son bâton vers le haut, de sorte que tu ne puisses pas l’attraper, alors frappe-lui la main qu’il a devant sur le bâton pendant qu’il est en train de le ramener vers le haut. Pendant qu’il refrappe d’en haut, et toujours avec la parade tournée vers le haut, saute plus en avant sous sa lance, vers lui. Ainsi tu ne lui laisses pas la place pour œuvrer, car plus tu arrives près de lui sous son bâton, moins il peut accomplir.
Mais si tu ne crois pas pouvoir te ruer sous son premier coup, alors esquive ce premier coup et laisse-le manquer sa frappe. Observe également bien le moment où il remonte [son arme] pour frapper le second coup, de sorte que tu viennes rapidement sous son bâton avec un saut. Aussitôt que tu t’es rué dessous, attrape encore une fois son bâton avec ta main gauche, comme précédemment et œuvre aux ouvertures avec la partie avant de ton arme.
S’il dirige un estoc contre toi, rencontre-le encore dans la garde basse à droite. Depuis celle-ci, va vers le haut avec ta garde et ton bras tendu en avant, de façon à ce que ta lame pende vers le sol. Dégage ainsi l’estoc qui vient vers toi de ta droite vers ta gauche avec la lame suspendue. Parallèlement à ce dégagement, saute bien sur son côté gauche, hors de son estoc. Ainsi tu ne fais pas que le dégager, mais tu sautes simultanément hors de l’estoc sur le côté, au cas où le dégagement serait trop faible par lui-même. Attrape encore une fois son bâton avec ta main gauche, comme au-dessus. Mais s’il retire l’estoc, rendant ainsi ton dégagement vain, et qu’il ré-estoque, alors reste avec la garde suspendue en l’air et dégage le second estoc qui vient vers avec la lame suspendue, de ta gauche vers ta droite. Avec ce dégagement, saute encore un fois hors de son estoc, vers sa droite, de la même manière que tu as sauté précédemment vers sa gauche. Tu peux ainsi aller à la rencontre de tous ses estocs retirés avec la lame suspendue et le bras tendu devant toi, et tu peux les dégager de chaque côté jusqu’à ce que tu puisses te ruer sur son bâton.
Une autre façon de te ruer sous lui
Laisse [aller] ton arme dans la garde basse à droite, comme avant, et observe le moment où il frappe depuis sa droite. Passe alors sous son bâton avec ton arme, vers ton côté gauche et marche simultanément avec ton pied droit, entre toi et lui, également sur son côté droit. En marchant ainsi [sur le côté], frappe fortement et soudainement depuis ta gauche vers le bâton qui vient vers toi, vers la main qu’il a devant en frappant. Tout ce ceci, c’est-à-dire le passement avec l’arme et le pas, doivent se faire rapidement en un bond. Tu dois également bien pencher ta tête en esquivant son coup par-dessous, ainsi la pièce se passera bien pour toi. Impose-toi fortement vers lui et ne le laisse compléter aucun coup.
Une autre pièce sur la manière dont tu dois lui dégager ses estocs
Après que tu l’aies tirée, dirige ton arme dans la garde haute pour la frappe. S’il estoque vers le bas de ton corps, alors ramène ton arme autour de ta tête et dégage-lui son estoc sur le côté, de ta gauche vers ta droite, avec la lame suspendue et saute aussitôt fortement à l’intérieur, vers son côté droit. S’il t’estoque en haut, écarte et pare-lui cela comme je te l’ai appris avant.
On voit ici le principe général contre les armes d’hast : se rapprocher le plus près possible pour saisir le bâton et empêcher l’adversaire d’agir en le collant avec une arme plus petite que la sienne. La défense privilégiée est la suspension, ce qui permet d’avoir tout de suite un coup prêt à être lancé.
En résumé, soit on se trouve dans une garde basse et il faudra monter de la droite vers la gauche, dans la lame suspendue pour se protéger, soit on se trouve dans la garde haute et il faudra dégager les estocs avec la lame pendante de la gauche vers la droite. Le principal avantage de la lance, outre sa longueur, est sa capacité à être rétractée rapidement pour contre attaquer aussi vite. Il faut être excessivement attentif à cela. Même si en théorie, frapper avec la lame suspendue permet d’être très réactif, Joachim Meyer explique que cela marche mieux contre des gens réellement vindicatifs qu’au sein de la salle d’armes ou les gens sont habitués à agir de la sorte avec les armes longues. De plus l’inertie de l’arme d’hast étant bien plus grande que celle de l’épée, il faut absolument bouger l’intégralité de son corps pour se protéger contre les coups et les estocs d’armes aussi lourdes.
L’épée seule de Joachim Meyer :
- Introduction
- Division de l’arme et de l’adversaire
- Déplacements et distance
- Gardes, coups et estocs
- Défenses et parades
- Description du combat chez Joachim Meyer
- Feintes et transformations de coups
- Travail au fer
- La porte de fer – Travail dans l’Après
- La porte de fer – Se protéger des feintes
- La porte de fer – Travail dans l’Avant
- La garde haute à droite
- La garde basse à gauche
- La garde haute à gauche
- La garde basse à droite
- La garde de la charrue
- Les entrées en lutte
- Epée et dague – Principes
- Epée et dague – Pièces
- Epée et cape
- Epée contre armes d’hast