La pique de Joachim Meyer, partie 4 : Manipulations à une main

Bien que la pique soit l’arme la plus imposante et la plus lourde que l’on puisse manier, il est malgré tout possible de l’utiliser avec une seule main, à la fois en attaque, qu’en défense. Ces manipulations à première vue risquées, semblent être cantonnées au duel et à la salle d’arme, où les enjeux ne sont pas les mêmes que sur le champ de bataille.

La principale raison qui pousse à utiliser la pique à une main , c’est la portée bien plus grande que l’on obtient en estoquant ainsi. L’estoc à une main est présenté dans la section de la garde haute pour l’estoc :

Combattre depuis la garde haute

Et premièrement, lorsque tu es dans la garde haute, de manière à ce que tu aies ta pique posée sur l’épaule droite [gauche ?] avec le pied gauche placé devant, et que ton adversaire estoque vers ta gauche, alors avance bien avec ton [pied] droit vers sa gauche, en sautant hors de son estoc. Estoque ainsi en même temps que lui, et en estoquant, laisse ta main gauche quitter la pique, et aussitôt tourne bien ton côté droit après l’estoc.

Lorsque tu as rapidement sauté hors de son estoc, que tournes ta main droite vers le haut et ta gauche en estoquant, et que tu as étendu ton bras droit au loin, alors il te manque et tu le touches. Après que tu aies estoqué ainsi, alors ramène aussitôt la pointe arrière vers le haut et vers toi avec ta main droite. Pendant que ta pique revient vers toi, recule avec ton pied droit et dans le même temps rattrape également ta pique avec ta main gauche. Tourne avec force ta main droite vers le bas, et donne à ainsi ta pique une impulsion vers le haut : tu en récupéreras à nouveau le contrôle.

Comme on le voit sur l’illustration, le gain de distance de l’estoc est considérable, car on projette le côté et la jambe droite vers l’avant, et la pique en bout de course est tenue le plus loin possible du corps.

Le revers de la médaille, c’est le risque de perdre le contrôle de l’arme. Avec une main, il sera difficile d’empêcher la pique de chuter au sol, ou de revenir rapidement dans une parade à deux mains. Mais il y a des techniques pour se protéger de l’adversaire :

Principe

Retiens ce principe à propos de la perte de contrôle de l’estoc. Lorsque tu as perdu le contrôle avec un estoc impulsif, quelle que soit la manière dont cela arrive, alors recule vivement ton pied avant et ramène la pointe arrière vers le haut, comme tu peux le voir avec le personnage en haut à droite de la gravure H.

Écarte ainsi tous ses estocs de riposte, puis rattrape ton bâton avec ta main gauche. Reprends-le rapidement totalement sous ton contrôle, jusqu’à ce que tu arrives dans la garde que la situation requiert. La pratique te dévoilera cela plus clairement.

Cette manière de parer est la plus évidente, mais elle à le défaut de faire rester dans une stratégie purement défensive. Joachim Meyer propose des solutions pour parer et riposter en tenant la pique à une main :

Comment tu dois donner une impulsion à ta pique avec une main, puis estoquer

Dans l’approche place-toi avec ta pique face à l’adversaire, de la même façon que le petit personnage en haut à gauche de la gravure L.

Aussitôt qu’il estoque, donne une impulsion à ta pique de ta droite vers ta gauche, devant ton visage, comme tu peux l’observer dans le comportement du personnage mentionné ci-avant, de manière à ce que dans ce mouvement, tu dégages sa pique avec la partie arrière de la tienne, ou que tu esquives [son estoc] en marchant sur le côté. En même temps, marche avec ton pied gauche derrière ton pied droit, vers lui, de façon à ce que tu lui tournes le dos, et avec l’inertie de ce premier mouvement, estoque vers son visage, en arrière sur ton côté droit et vers le haut. Avec cet estoc recule également vers lui avec ton pied droit. Dès que l’estoc a été réalisé et pendant que ta pique est encore devant en train de tomber vers le sol, alors reste sur place avec ton pied droit, mais fais un grand pas loin de lui avec ton pied gauche et envoie ton haut du corps loin de l’adversaire, par-dessus ton genou gauche, qui doit être bien fléchi vers l’avant. Puis ramène aussitôt la pointe arrière à toi avec ta main droite, jusqu’à ce qu’elle soit sur le sol, près de ton pied gauche et attends ainsi qu’il estoque.

Aussitôt qu’il estoque, alors encore une fois, donne une puissante impulsion à ta pique vers le haut, depuis ta gauche vers ta droite. Avec ce mouvement, saute simultanément avec ton pied gauche bien vers son côté droit. Pendant que ta pique est encore en l’air grâce à l’inertie du mouvement, estoque d’en haut vers son visage avec une main.

Et durant tout cela, tu dois fermement tenir ta pique par la pointe arrière, de façon à ce qu’en tenant la pique, le petit doigt soit tourné vers le bâton et le pouce ainsi que l’index soient tournés vers la pointe.

Le plus important avec cette technique est de savoir envoyer le talon de la pique de la bonne manière, pour pouvoir riposter après la parade. C’est la clé de la manipulation à une main : connaître les bons mouvements à effectuer pour toujours être capable d’envoyer son arme vers l’adversaire. C’est la thématique de la dernière pièce, où l’on explique comment lever la pique du sol avec une seule main :

Un autre estoc à une main

Poste-toi devant l’adversaire de la manière qui est montrée par le personnage en haut à droite de la gravure B.

Pousse à une main ta pique loin de toi avec une secousse et ramène soudainement la pique à toi par la pointe arrière vers ta gauche, afin qu’avec cette secousse elle s’élève et s’envoie d’elle-même vers le haut et l’avant. Dans ce mouvement vers le haut, marche bien sur ta droite, vers lui, et estoque encore une fois à une main vers lui.

Ces trois dernières techniques on la particularité de commencer avec la jambe droite devant et l’arme tenue à une main. Or si l’on suit le texte, on ne peut arriver dans cette position qu’après un estoc à une main. Il est donc pertinent de penser que ces techniques sont des moyens de garder l’avantage après avoir attaquer l’adversaire de cette manière.


Les techniques à une main sont spécifiques à Joachim Meyer, on les retrouve pas dans le combat à la pique de Paulus Hector Mair, ce qui les rends encore plus singulières. A cause de leur difficulté, et du fait que l’on se met plutôt en danger en les réalisant, ces techniques à une mains devraient être utilisées de façon ponctuelles. Malgré leur côté spectaculaire, elles ne sont qu’un élément anecdotique du combat à la pique.

Leave a Reply

Fill in your details below or click an icon to log in:

WordPress.com Logo

You are commenting using your WordPress.com account. Log Out /  Change )

Facebook photo

You are commenting using your Facebook account. Log Out /  Change )

Connecting to %s