Les gardes sont essentielles dans l’escrime : ce sont les points de départ et d’arrivée de chaque action. Les attaques, comme les défenses partent d’une garde pour finir dans une autre. Elles balisent ainsi la gestuelle, permettant de découper des phrases d’arme complexes en éléments plus simples.
Gardes
Comme toutes les armes, le dussack utilise un système de gardes. La plupart des gardes du dussack sont calquées sur celles de l’épée longue. Leurs noms reprends d’ailleurs ceux que Lecküchner donnait dans son traité sur le coutelas. On se retrouve donc avec quatre gardes principales, et plusieurs autres gardes secondaires. Ces gardes sont caractérisées par le quartier qu’elles occupent : en haut/en bas, à gauche/à droite, ou alors par leur position centrale.
Les quatre gardes principales sont : la garde du Veilleur, du Taureau, du Sanglier et le Bastion
Les gardes secondaires sont : La parade droit devant, l’Arche, le Changement, la garde de médiane, la garde de la Colère et la Longue Pointe.
Le Veilleur
Place-toi ainsi dans cette garde : tiens-toi avec le pied droit devant, tiens ton dussack au-dessus de ta tête, et laisse la lame pendre derrière toi

La garde du Veilleur, ou garde haute, est l’équivalent de la garde du Jour à l’épée longue. Cette position est celle depuis laquelle on donne les coups de dessus, et c’est donc vers elle que l’on reviens souvent lorsque le dussack arrive en bas.
Le Taureau
Tiens-toi avec ton pied gauche devant, tiens ton dussack avec la garde sur ta droite et à côté de ta tête, de façon à ce que la pointe avant se trouve vers le visage de l’adversaire

La garde du Taureau est l’équivalent de la garde du Bœuf de l’épée longue. C’est une position qui menace d’un estoc, mais d’où l’on peut aussi envoyer des frappes. Dans ce cas là, il faut envoyer le dussack autour de la tête jusque dans le Veilleur ou la Colère avant de frapper. On note que le Taureau à droite est fait avec le pied gauche devant au dussack, alors que la majorité des actions de cette armes se fait avec le pied droit devant. A contrario, la garde équivalente à l’épée seule, la garde haute pour l’estoc à droite, se fait avec le pied droit devant. C’est peut-être là un vestige d’une escrime allemande ancienne, comme celle de Lecküchner, qui perdure au sein de ce nouveau système où une jambe unique est devant.
Le Sanglier
La garde du Sanglier est seulement utilisée à droite, de la même façon que te montre le personnage à gauche de la gravure M.

La garde du Sanglier est l’équivalent de la garde de la Charrue à l’épée longue. Joachim Meyer ne décrit pas cette garde, et indique juste de se référer à la gravure. Le nom et l’illustration de cette garde rappellent la garde du Sanglier de Leckuchner, mais avec quelques différences sur la position de l’arme : ici la main semble plus en arrière et la pointe ne semble pas dirigée vers l’adversaire. De puis cette garde, on va surtout venir dans l’Arche protéger sa tête.
Le Bastion
Tiens-toi avec ton pied gauche devant, tiens ton dussack loin de toi, sur le sol, avec le bras tendu, de la même manière qu’avec la garde du Fou à l’épée longue, à ceci-près que tu dois ici venir plus loin devant ton pied gauche avec la garde, et bien pencher ton haut du corps à la suite de celle-ci.
Le Bastion peut également être fait de cette manière : tiens-toi comme avant, tiens ton dussack devant ton pied avec la pointe sur le sol, de façon à ce que la garde se trouve vers le haut.
Le Bastion est la dernière des gardes principales du dussack, et comme sa description, l’indique, est l’équivalent de la garde du Fou de l’épée longue. C’est la seule garde à ne pas être associée à une illustration, mais le grand personnage de la gravure B correspond assez à la seconde description, à l’exception de la jambe avant qui n’est pas la même.

Dans les différentes représentations du dussack en dehors de l’ouvrage de Joachim Meyer, on trouve de façon récurrente une position basse assez similaire au Bastion. La différence étant l’équilibre du corps : dans le Bastion de Meyer, le corps est penché par-dessus la jambe gauche, alors que dans ces autres représentations, il est penché par-dessus la jambe arrière, comme dans la garde de la Colère. On constate que cette variation permet ainsi de ramener sa tête en arrière.

La parade droit devant
Tiens-toi avec le pied droit devant, tiens ton dussack en avant avec le bras tendu, de manière à ce que le long tranchant et la pointe se trouve vers l’avant et face à l’adversaire

La parade droit devant, que l’on retrouve mentionnée de façon fugace dans la partie sur l’épée longue est la posture préférée de Joachim Meyer au dussack. L’arme étant au centre, on peut ainsi mieux se protéger des attaques de l’adversaire. Comme son nom l’indique, la parade droit devant est un posture que l’on adopte pour se défendre des attaques de l’adversaire et attraper les coups.
Si les gardes centrales comme la Longue Pointe existaient déjà dans l’escrime allemande, mettre autant leur utilisation en valeur est une vraie nouveauté par rapport au reste de la tradition. La parade droit devant est également un élément primordial dans le maniement de l’épée seule, où elle aura également le nom de Porte de Fer.
L’Arche
Place-toi dans cette garde, qui est la parade d’en dessous, de la manière montrée par le personnage à gauche de la gravure attenante [N].

L’Arche et le complémentaire de la parade droit devant. Le premier est la parade haute venant d’en bas, le second la parade basse venant d’en haut. Cette garde centrale n’a pas vraiment d’équivalent à l’épée longue, mais la Pointe suspendue rempli un rôle analogue.
Encore une fois la garde n’est pas décrite et il faut seulement compter sur une image pour se la représenter : elle se fait avec la jambe droite devant, la main droite à hauteur de la tête et le bras tendu vers l’avant, le vrai tranchant vers le haut, de manière à pouvoir attraper les attaque venant de dessus.
La Longue Pointe
Tu te tiens ainsi avec le bras tendu dans la Longue Pointe, que te montre le grand personnage à gauche de la gravure suivante [C].

La Longue Pointe est le point de passage de toutes les frappes, et a position d’arrivée de tous les estocs. C’est la position dans laquelle on vient toucher l’adversaire avec la plupart des attaques.
Il s’agit également d’une garde dont la description n’est pas donnée. D’après l’image, la Longue pointe se fait avec le bras tendu, la pointe de l’arme dirigée vers le visage de l’adversaire. La jambe avant est fléchie, la jambe arrière tendue, et le corps est présenté plutôt de profil.
La garde de la Colère
Le grand personnage à droite de la gravure précédente [M] t’enseigne comment tu dois te placer dans cette garde.

La façon dont tu dois te placer dans la Colère à gauche t’est enseignée par le personnage à droite de la gravure L.

La garde de la Colère est la posture d’où partent les coups diagonaux. Comme toutes les gardes, elle se fait à droite et à gauche. La garde de la Colère au dussack se prend de la même manière qu’à l’épée longue, avec l’arme sur l’épaule, la lame pendant en arrière, et le corps penché par-dessus ma jambe arrière, ce qui permet de reculer la tête.
Le Changement
Place-toi ainsi dans cette garde : tiens-toi avec le pied droit devant, tiens ton dussack avec le bras tendu à côté de toi et avec la pointe sur le sol, de façon à ce que le court tranchant se trouve face à l’adversaire, comme te l’enseigne le grand personnage à droite de la gravure N.

Le Changement est la garde opposée à la Colère. Lorsque l’on donne un coup diagonal depuis la garde de la Colère, on finit en général dans la garde du Changement du côté opposé. Dans cette posture la main est au niveau de la hanche, la pointe vers le sol, le faux tranchant tourné vers l’adversaire.
Meyer aborde très peu le Changement à droite, et cela pose la question de quelle jambe placer devant. On a alors le choix en deux options : si l’on suit ce qui se fait pour la garde du Taureaux, de la Colère, ou du Sanglier, c’est la jambe gauche qui sera devant. Mais comme c’est la jambe droite qui reste devant la plupart du temps et qui avance avec la frappe, c’est également elle qui peut être devant, et on se retrouve ainsi dans le Changement à droite avec l’arme à l’extérieur de la jambe droite, comme à l’épée seule.
La garde médiane
Pour cette garde, place-toi de la même manière que te montre le personnage à droite de la gravure [C].

La garde médiane est le point de départ et d’arrivée des coups médians. C’est également une posture dans laquelle on arrive après avoir frappé loin sur le côté avec le coup tordu. Joachim Meyer ne donne pas de description de cette garde, mais le placement du corps à l’air d’être similaire à celui de la garde de la Colère, mais avec l’air sur le côté, sous le niveau de l’épaule.
Les frappes
Les gardes sont la bases des coups : frapper c’est passer d’une garde à une autre en envoyant son arme vers l’adversaire. Ainsi pour lancer une frappe, il faut partir d’une gardes haute, basse, gauche ou droite et finir dans la garde opposée. En frappant le bras est tendu, si bien que l’on passe par la garde de la Longue Pointe lorsque l’on touche l’adversaire. Un coup de haut se finit donc dans une garde basse, et un coup de bas se termine dans une garde haute. Un attaque s’accompagne toujours d’un déplacement, qu’il soit vers l’avant, l’arrière ou sur le côté. C’est pourquoi, en même temps que l’on attaque, il faut faire une fente avec la jambe avant pour arriver à portée de l’adversaire avec le faible de son arme.
Un coup de haut depuis la droite démarre ans dans la garde de la Colère à droite, passe par la Longue Pointe, puis fini dans la garde du Changement à gauche. De même un coup de haut depuis la gauche va partir depuis la garde de la Colère à gauche et descend jusque dans la garde du Changement à droite, toujours en passant par la Longue Pointe.
Les coups de dessous partent des gardes basses, cependant ils faut tourner la pointe vers l’arrière afin de les donner avec le long tranchant. Ils remontent vers le côté opposé en suivant la ligne diagonale et se terminent dans la garde du Taureau. Ces coups de bas passent aussi par la Longue Pointe, mais avec la main soit retournée, ce qui est l’équivalent de l’Arche.

Un coup de dessus de la droite vers la gauche
Les coups suivent quatre angles d’attaque, comme pour l’épée longue, et visent un des quartiers, ou “ouvertures”, comme l’ont montré les lignes divisant le corps de l’adversaire. Les frappes se donnent ainsi verticalement, en diagonale, horizontalement et selon la diagonale montante. Les différentes pièces que l’on trouve au dussack montrent que les frappes se font essentiellement à hauteur de la tête, mais Joachim Meyer précise bien qu’il est possible de faire autrement.
Les lignes de frappes sont expliqué à l’aide du diagramme ci-dessous. Des lettre indiquent le point de départ et d’arriver de chaque frappe. Ainsi une frappe verticale passera par la ligne A-E, une frappe diagonale de droite à gauche par la ligne B-F, etc…

Les estocs
Malgré une forme qui en fait une arme particulièrement adaptée à la taille, les estocs existent bels et bien au dussack. Ce n’est bien sûr pas la manière principale d’attaquer, mais ils sont paradoxalement très présent pour une arme pratiquée dans le contexte de Fechtschulen, où l’estoc est interdit.
Comme pour les frappes, les estocs se font en passant d’une garde à une autre. Les estocs partent des quatre suspensions, que sont les deux gardes du Taureau et du Bœuf, et se terminent dans la Longue Pointe. Cela se fait évidemment accompagné d’une fente, comme pour toutes les attaques.

Contrairement aux frappes qui sont accompagnées de multiples exemples sur les différents types de coups qui peuvent être employés, le contenu spécifique aux estocs est plutôt chiche. En plus de l’estoc utilisé comme une attaque de base, Joachim Meyer indique que les meilleurs contres au dussack se font en tournant la pointe vers le visage de l’adversaire depuis le liage. Ceci fera l’objet de deux billets dédiés, sur les parades et le liage, mais on peut dès à présent noter que ce principe est remincissant de l’escrime au coutelas de Lecküchner, et se retrouve grandement apprécié dans la partie sur l’épée seule.
Le dussack de Joachim Meyer :
- Généralités sur le dussack
- Divisions de l’adversaire et de l’arme
- Déplacement et distance
- Gardes, coups, et estocs
- Travail avec les coups principaux
- Coups secondaires
- Défenses et parades
- Description du combat chez Joachim Meyer
- Travail au fer
- Changements de cible et feintes
- Le Veilleur
- Le Taureau
- La Colère
- La parade droit devant
- L’Arche
- Le Sanglier
- La garde médiane
- Le Changement
- Le Bastion
- Les entrées en lutte
Pingback: Le dussack de Joachim Meyer, Partie 5 : Travail avec les coups principaux | Lecture & Combat
Superbes articles, merci beaucoup. J’ai seulement remarqué une erreur dans celui-ci: pour la guarde du Changement, vous avez mis la description de la Guarde Médiane. La description du changement est la suivante:
“Pour prendre cette garde, met le pied droit devant, et tiens ton dusack sur le coté, le bras tendu et la pointe sur le coté et vers le bas, de manière à ce que le faux tranchant soit dirigé vers l’adversaire, comme cela est montré sur la grande illustration à droite de l’image N. ”
(traduction disponible sur le site laghilde.free.fr)
LikeLike
Bien vu, j’ai corrigé ^^
LikeLike